Rhumatismes des mains : médicaments ou chirurgie ?

En cas d'articulations gonflées, de doigts déformés, les gestes de la vie quotidienne deviennent beaucoup plus compliqués. Heureusement, des solutions existent contre le rhumatisme de la main. Des plus simples aux plus sophistiquées.

Patient âgé Ayant Un Examen Médical Pour Le Rhumatisme Des Mains
© istock

L'arthrose et la polyarthrite rhumatoïde de la main : symptômes, traitements et innovations

Parmi les rhumatismes de la main, l'arthrose est une maladie très fréquente, qui touche surtout les femmes après la ménopause. Selon un processus encore mal connu, le cartilage s'use à l'endroit où les extrémités osseuses d'une articulation se rejoignent. L'os subit une érosion, mais au lieu de se reconstituer là où il a été abîmé, il "repousse" de façon anarchique. Dans l'arthrose de la main, des tuméfactions dures et douloureuses apparaissent à l'extrémité des doigts et à hauteur des dernières articulations. Souvent, la racine du pouce est elle aussi touchée (rhizarthrose). L'articulation qu'elle forme avec le poignet s'use et, petit à petit, le pouce a tendance à se rétracter vers la paume de la main. Un geste banal, comme attraper un objet, devient alors difficile.

À l'heure actuelle, aucun médicament ne peut ralentir l'évolution de l'arthrose qui, souvent, finit par se stabiliser d'elle-même. Il existe, en revanche, des traitements au long cours qui calment la douleur et l'inflammation (sulfate de chondroïtine, diacerhéine, extraits d'avocats et de soja). Parallèlement, des anti-inflammatoires sont prescrits dans les périodes de crise pour soulager le malade.

Dans ce domaine, une classe de produit représente une véritable révolution : les anti-cox 2 (rofecoxib et celecoxib) . Contrairement aux anti-inflammatoires classiques, ils ont peu d'effets secondaires et, surtout, ils ne sont pas toxiques sur le plan digestif.

Néanmoins, lorsque l'arthrose résiste à tous ces traitements, et en particulier si le pouce est atteint, on a recours aux infiltrations de cortisone. Parfois, la chirurgie est nécessaire. Avant d'en arriver à cette solution extrême, on préconise souvent aux malades d'utiliser une orthèse. Il s'agit d'une attelle que l'on porte quelques heures par jour, au repos. Par exemple : en dormant ou en regardant la télévision. Grâce à ce système, les doigts et le poignet sont maintenus dans une bonne position, ce qui freine la déformation de l'articulation, et calme aussi la douleur. Certaines orthèses sont fabriquées en série, mais les plus efficaces sont faites sur mesure par thermo-moulage.

En dehors de l'arthrose, il existe d'autres formes de rhumatismes que l'on appelle "inflammatoires"

Shema Rhumastime De La Main

Il s'agit essentiellement de la polyarthrite rhumatoïde (PR), une affection qui touche en majorité les femmes. Tous les âges sont concernés, mais la maladie se manifeste en moyenne vers 45-50 ans.

Les origines de la PR sont très complexes. Seule certitude, des prédispositions génétiques sont en jeu.

D'autres facteurs (variations hormonales, agents infectieux) viendraient ensuite se greffer sur ce terrain favorable. Mais leur influence est encore mal évaluée.

La PR évolue de façon très différente de l'arthrose. À la base, il s'agit d'une inflammation de la membrane synoviale qui entoure chaque articulation. Cette membrane gonfle, ce qui provoque un épanchement de liquide dans l'articulation. Peu à peu, l'inflammation s'attaque aussi au cartilage et à l'os qu'elle détruit progressivement.

Dans la polyarthrite rhumatoïde, toutes les articulations sont touchées, mais celles des mains et des pieds sont les premières concernées. La douleur est sensible surtout la nuit et le matin. Au réveil, les articulations sont complètement ankylosées et il faut parfois plusieurs heures pour parvenir à les dérouiller en les bougeant et en les passant sous l'eau chaude.

II y a quelques années, la polyarthrite rhumatoïde était une maladie terriblement handicapante qui laissait peu d'espoir aux malades. Mais des médicaments sont apparus, et modifient complètement les perspectives. II n'empêche, un soutien psychologique est souvent nécessaire pour rassurer le malade et lui expliquer les enjeux.

Dans le traitement de la PR, on agit à la fois sur les symptômes et sur l'évolution de la maladie. Les anti-inflammatoires ne sont pas prescrits ponctuellement comme pour soigner l'arthrose, mais sur de longues  périodes.

D'où l'intérêt des nouveaux anti-cox 2. Parallèlement, certains malades peuvent suivre un traitement au long cours à base de cortisone, mais avec un cortège d'effets secondaires importants.

Pour ralentir l'évolution de la maladie, on préconise aussi des traitements de fond. Pendant longtemps, les sels d'or constituaient la référence. Ils sont encore prescrits, mais ont été supplantés par le méthotrexate. Ce dernier est efficace (avec l'inconvénient de provoquer de nombreux effets secondaires). Le léflunomide semble avoir les mêmes effets bénéfiques que le méthotrexate, tout en étant mieux toléré.

De nouveaux médicaments pour le rhumatisme des mains

Mais la véritable révolution dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde viendra sans doute des anti-TNF. Le TNF (tumor necrosis factor) est une molécule que notre organisme sécrète naturellement. Mais lorsqu'une articulation est malade, elle se met à en fabriquer de manière anormale. Les scientifiques ont donc cherché un moyen de neutraliser ce TNF. Ils ont mis au point deux médicaments qui, pour l'instant, sont réservés aux malades gravement atteints et délivrés uniquement dans un cadre hospitalier. L'infliximab est commercialisé en France depuis le mois d'août 2020.

Il est beaucoup plus efficace que tout ce que l'on a vu jusqu'à présent. Les essais thérapeutiques ont montré que 80 % des malades répondaient au traitement et que l'on réussissait à limiter la progression de la maladie. Le deuxième anti-TNF, s’appelle l'etanercept. Ces deux produits représentent une avancée considérable, mais coûtent plutôt cher.

Une année de traitement par l'infliximab revient environ à 12 000€ par patient. Autre inconvénient : on manque de recul pour mesurer l'efficacité et l'éventuelle toxicité de ces produits à long terme.

Pour les patients, c'est une lueur d'espoir. En attendant, ils doivent apprendre à vivre au jour le jour avec leur mains gonflées et douloureuses. Il y a toujours quelque chose à faire pour entretenir ses articulations.

« Nous essayons d'expliquer aux gens qu'ils ne doivent pas se mettre dans le statut d'une personne handicapée », lance Jeanne Servin. Elle enseigne à ses patients des astuces simples qui permettent d'accomplir les gestes les plus quotidiens sans se faire mal. Son travail a également un aspect plus technique. Il s'agit d'ajuster au mieux l'appareillage de repos, la fameuse orthèse. Pour les malades souffrant d'arthrose, seuls le pouce et le poignet sont pris. En ce qui concerne les malades souffrant de PR, l'attelle remonte jusqu'au tiers de l'avant-bras. Il faut la porter en moyenne quatre heures par jour.

D'autres systèmes légers peuvent être mis au point, au cas par cas, pour prévenir la déformation des doigts. Les ergothérapeutes rééduquent les mains de patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde.

Malheureusement, les exercices de rééducation semblent moins efficaces pour les personnes atteintes d'arthrose. Après un bain de chaleur dans de la paraffine liquide, les mains sont massées pour les détendre et les assouplir.

Puis l'ergothérapeute leur fait prendre différentes postures sur un plateau en bois, en maintenant les doigts en place grâce à des élastiques. La séance, qui dure une vingtaine de minutes, sert à contrecarrer la déformation des articulations et à remuscler les mains. Trop rarement utilisée, cette technique n'est pas pratiquée partout. Anne Sevezan s'étonne de voir arriver des patients qui n'ont jamais bénéficié d'une rééducation. « Résultat, les muscles fondent, les gens ne sortent plus de chez eux et la maladie prend peu à peu le dessus », regrette-t-elle.

Ménager ses mains ne signifie pas abandonner toute activité. Au contraire. Pour conserver l'usage de ses articulations, il faut les faire travailler, sans forcer.

Ménagez vos poignets

La lutte contre les rhumatismes se mène aussi dans la cuisine ou la salle de bains. Quelques astuces à titre d'exemples :

  • Aux robinets classiques, qui obligent à se tordre le poignet, on préférera les robinets à levier. Même chose avec les Cocotte-Minute. Certains modèles s'ouvrent automatiquement en appuyant simplement sur un bouton. Pour ouvrir les conserves, inutile de forcer. II existe des appareils électriques très pratiques.
  • Beaucoup de malades se demandent s'ils peuvent continuer à conduire. Ce n'est pas un problème, mais mieux vaut choisir un véhicule avec une boîte automatique.
  • Pour porter une charge, utiliser le plus possible les deux mains : l'une porte, l’autre supporte.

L'opération comme solution pour le rhumatisme des mains

En cas d'arthrose

Quand les déformations sont disgracieuses, quand la douleur est continuelle (ou presque), ou quand certains mouvements sont impossibles, une intervention chirurgicale peut être programmée,

Elle s'effectue en général sur les articulations les plus touchées par cette maladie : celles de l'extrémité des doigts (entre la deuxième et la troisième phalange) et la base du pouce (plus exactement sur le poignet, à la base de la "colonne" du pouce).

Mais, en cas de nécessité, une opération peut être proposée pour toute autre articulation de la main.

Sur la base du pouce

Shema Arthrose Du Pouce

L'articulation peut être douloureuse, grippée, parfois déformée, ce qui rend impossible la préhension de certains objets. Lorsque l'articulation est douloureuse depuis deux ou trois ans et si les injections de cortisone (pas plus de deux, voire trois) n'ont eu qu'un effet éphémère, l'opération est recommandée. Elle consiste à enlever les tissus abîmés ou détruits dans l'articulation et à la "reconstruire" en utilisant des portions de tendons prélevées au niveau du poignet du patient (tendinopathie, en terme médical). Le chirurgien fabrique avec ce tissu tendineux une petite sphère pour constituer une sorte de roulement à bille biologique à la base du pouce. Pour fixer cet ensemble, il met des petites broches d'immobilisation (enlevées quatre à six semaines plus tard).

L'opération peut se faire sous anesthésie loco-régionale (par une piqûre dans le creux de l'aisselle ou, plus rarement, à la base du cou). En général, elle ne nécessite pas d'hospitalisation : elle est effectuée le matin et le patient rentre chez lui le soir. Sauf problème particulier, une semaine après l'intervention, le patient retrouve une assez bonne agilité (il peut reconduire, par exemple). Des séances de rééducation sont souvent nécessaires. La cicatrice sur le pli de flexion à l'intérieur du poignet se voit à peine.

En cas de polyarthrite rhumatoïde

L'intervention chirurgicale a deux objectifs :

  • Redresser la main déformée : Le poignet et surtout les doigts qui se dirigent vers l'extérieur.
  • Enlever le tissu malade (le panus synovial) situé dans les articulations proprement dites, mais aussi autour des ligaments et tendons.

L'opération est programmée en dehors de toute poussée inflammatoire. Ce qui peut nécessiter de changer le traitement (augmenter la posologie, ou changer de médicaments). Le chirurgien intervient au niveau du poignet et de la main pour "réaxer" l'ensemble des articulations. Car pour éviter ou prévenir l'usure des articulations, il faut remettre face à face les surfaces articulaires.

Sur les dernières articulations des doigts

L’arthrose engendre parfois des excroissances sur les articulations du bout des doigts. En plus de leur aspect particulièrement disgracieux, ces déformations sont souvent douloureuses (surtout lors des poussées inflammatoires).

L'opération consiste à enlever ces excroissances et les tissus abîmés de l'articulation. Le chirurgien peut bloquer ces articulations en légère flexion (on parle d'arthrodèse). Cela présente l'avantage de ne pratiquement pas gêner l'utilisation des doigts et de permettre un grand confort car ces articulations alors immobiles ne seront plus douloureuses. Les cicatrices sont, en général, pratiquement invisibles car situées dans les plis des doigts.

À qui s'adresser ?

Même si toute intervention présente certains risques (infectieux, médicamenteux...) il est conseillé de ne pas attendre le "dernier moment" pour l'envisager.

Le résultat est meilleur si l'opération est effectuée à temps. Si l'on attend trop pour prendre une décision, les muscles risquent d'être atrophiés, n'ayant pas fonctionné depuis longtemps, les articulations, tendons risquent aussi d'être trop abîmés.

Cette décision opératoire doit être prise — surtout pour la PR — en concertation avec le patient, le généraliste, le rhumatologue, le kinésithérapeute, et le chirurgien. Des services hospitaliers ont d'ailleurs des consultations multidisciplinaires (Paris, Nancy, Montpellier...). Pour toutes ces interventions, il est conseillé de s'adresser à des chirurgiens spécialistes de la main. En plus d'une expérience spécifique sur les os, les articulations, les tendons et les ligaments de la main, ils ont une compétence particulière sur la peau de la main, sa réparation et sa cicatrisation.

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